10 – 11 août – Ouidah – l’esclavage – la route des pêches – le chemin du retour

Publié le par La chorale

Dimanche qui va mettre un point final à l’aventure béninoise pour ces 17 petits Suisses.

Souvenirs empaquetés, valises embarquées, factures réglées, chacun prend place dans son véhicule. La route s’annonce périlleuse aujourd’hui.

Tout d’abord nous faisons en sens inverse le parcours « tôle ondulée ». Ca fait descendre les déjeuners.

Faire la route, comme disent les aventuriers, c’est voir défiler derrière la vitre le film de tous les étonnements : cabines téléphoniques dans lesquelles se trouve un « téléphoniste ». Véhicules crachotant, rafistolés, bringuebalant… Chargements précaires, vacillants, hésitants mais toujours de première nécessité. Femme au port de reine, d’une beauté à couper le souffle, portant sur le crâne des charges parfois monumentales en se jouant des lois de l’équilibre, un enfant arrimé sur leur dos. Motos chargées de 3, voire 4 occupants. Troupeaux de vaches à bosse, de chèvres, de moutons sans berger. Etalages de poissons séchés, de tomates, de poivrons, de légumes aux noms exotiques, le tout observé en sautant d’un trou à une bosse avec la dextérité d’un ouistiti en colère.

Nous rejoignons Ouidah dans la matinée et mettons pied à terre au musée historique. Sa visite nous fait plonger dans la période dramatique de l’esclavagisme. On ne peut pas ne pas être interpellé. En quelques objets – chaînes, carcans, … - le guide nous plonge dans l’infâme. Plus de 15 millions d’esclaves ont quitté les côtes africaines dans les bateaux négriers. Le musée est installé dans le Fort portugais, le seul qui reste parmi les 7 qui se trouvaient à Ouidah à l’époque. La visite du musée préfigure la route des esclaves que nous allons parcourir ensuite : entre Ouidah et le bord de mer, sur quelques kilomètres, se déroule, comme un chemin de croix avec ses étapes, la route qu’empruntaient les esclaves enchaînés vers les vaisseaux de l’horreur. A l’une des étapes, l’arbre de l’oubli (où l’on se déparait de sa vie passée) ; à une autre la case où les esclaves étaient stockés à 250 durant 15 jours sans manger ni boire (ça semble impossible, mais...), pour tester leur résistance ; les plus faibles ne monteront donc même pas sur l’embarcation. Puis vient la fosse commune où les plus malchanceux finiront le court chemin. Au bout de la route, la porte du non retour. Arche offerte par l’UNESCO en 1995 pour commémorer le génocide, l’immonde souvenir.

Seuls les marchands de souvenirs nous haranguant empêche le recueillement qui devrait s’imposer.

Nous reprenons les bus pour entamer la route des pêches (pas le fruit, mais l’activité). Les montagnes russes ont repris. Conduire sur de telles routes demande une pratique autre que celle de nos contrées helvétiques. Les conducteurs d’ici comme leurs véhicules y sont rompus. A propos de rompu, c’est la tête d’Anne-Lise qui a failli se rompre contre le plafond du véhicule au passage d’une ornière trop profonde !

Tout au long de la route, les pêcheurs tirent inlassablement leurs immenses filets vers la rive, avec l’aide de tous les habitants du village. Pêche ancestrale, seul produit de la population locale. Notre chauffeur achète 2 poissons pour sa famille ! Ca va dégager dans le bus !

Déjà plus de 15 kilomètres quand une enseigne de restaurant crée la surprise : Arlette avait bien gardé le secret ! « Au jardin Helvetia ». Drapeaux suisses et autres décorations à connotation de chez nous nous accueille pour le repas de midi. Le lieu est tenu par un Bâlois exilé par amour. Rassurons-nous le repas reste très béninois : nous goûterons encore une fois aux bananes plantain ! Mais une tarte aux pommes est proposée en dessert.

La pause était salutaire, on attaque la dernière étape avec un regain d’énergie.

Les dernières paillotes. Sur une douzaine de kilomètres. On commence à croiser des voitures plus élégantes. Les habitants aisés de Cotonou passent le dimanche à la plage…

La route s’améliore soudain. Changement de décor en quelques minutes. Après avoir longé l’aéroport, on entre dans le quartier résidentiel, celui des ambassades entre autres. Puis à nouveau le flot des voitures, mais moins dense en cette fin d’après-midi dominical. Un arrêt à une courte distance de l’aéroport. On y a rendez-vous avec la femme de notre Lambert à laquelle nous avions commandé noix de coco râpées et cacahuètes salées en flacons.

Dernières folies vestimentaires de ces dames dans le marché juste en face. Au prochain carnaval de la Côte, elle pourraient monter un char exotique : elles ont tous les boubous et autres pagnes nécessaires !

On voit que c’est la fin du voyage : Bernard et Jacques ont commandé des grandes bières, mais autour de la table, chacun peine à arriver au fond du verre !

Dernières plaisanteries. Derniers jeux de mots sur terre béninoise. L’humour est un bon remède contre la nostalgie.

Les bus nous déposent devant l’entrée des départs ! Embrassades, pourboires, promesses de touristes… On a déjà oublié les conditions de vie au fond des villages perdus dans la savane. Nous avons déjà remis nos souliers de bons Européens pleins de leurs certitudes qui calculent le nombre d’heures qui nous séparent encore de la douche.

Hall d’aéroport. Equilibrage des valises. Fiches de police. « Les bouteilles qui contiennent des cacahuètes, c’est une bouteille, mais c’est pas du liquide, ça passe ? » « M’étonnerait, répond Bernard ». On vide, on transvase, on remplit, on pèse… On ne voit que nous dans l’aérogare.

Martine fait des siennes au portillon ! On avait pourtant dit « Pas d’antimoustique ! Pas de ciseaux à ongles ! » « Oui, mais mon peigne ! Quand même ! Il va l’offrir à sa femme ? » (ce n’est pas du mot pour mot, mais elle a bien tempêté !)

Tout le monde est de l’autre côté. Une heure à patienter pour embarquer. Ca parlotte, ça discutaille au milieu des autres passagers, plus blancs qu’à l’aller, même si en moyenne plus bronzés.

Interminable embarquement. Contrôle. Re-contrôle. Re-re-contrôle. De quoi foutre les jetons : un terroriste à bord ? Nouveau contrôle des sacs sur le «tarmac». Du jamais vu.

Enfin dans le « gronavion » ! Mais pas encore le décollage. On reste collé au sol, moteurs arrêtés, sans clim’ c’est sauna en prim’ ! Problème technique nous annonce-t-on. Pincement à l’estomac. Déjà plus d’une heure de retard. On flippe pour nos correspondances. Après 75 minutes, départ, enfin !

Miraculeusement un vol calme. On se sent pourtant serrés dans ce zingue. Bernard et Chantal, tout en queue, ont encore moins de place que les autres. On réussit à dormir un peu. Le temps passe plus vite que prévu. Le sommeil n’y est pas pour rien.

Roissy. L’Europe. Nos normes. Mais les contrôles restent sévères. Le désinfectant pour les mains est suspect. Pauvre Arlette. Le groupe est de nouveau compact. Nouvel embarquement. Nouvel envol pour seulement trois quarts d’heure cette fois.

On a remis les montres à l’heure d’été.

Il est temps d’écrire le dernier verset du voyge :

Valises en main

Le cœur chagrin

Adieu le Bénin

On rentr’

On rentre chez nous !

Les souvenirs

Nous font frémir

Entre larmes et rires

Bientôt

La Suisse au mois d’août !

Et de reprendre au refrain, parce que ça fait moins triste :

Ayélévi me coulo mi…

Nostalgie ? Un peu oui ! On se réjouit déjà de parcourir le blog pour mieux se rappeler !

Adieu Bongard, adieu Razak, adieu Haris ! SMS : salut les enfants… vous venez nous chercher à l’aéroport ?

Seuls les chapeaux de paille tressée qui coiffent les bagages rappellent encore les latitudes subtropicales. « On s’appelle, on s’entremail » ! « Oui, c’est promis. » Oui, mais voilà : le voyage est bien fini…

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B
Merci Martine pour cet ensemble de petits récits. Belle plume, anecdotes généreuse et quelques (j aurais aimé en voir plus :) belle photos.<br /> <br /> On est rassuré que Bernard ait quand même trouvé une bière par ci par la en fin de journée!<br /> <br /> ;) merci
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